Les leçons environnementales de la crise du coronavirus
Moins de tout: la planète vit soudain à un rythme différent, marqué par moins de consommation, moins de trafic, moins d’énergie brûlée, moins de bruit, moins de pollution. Par solidarité avec les personnes dont la santé est en danger, nous faisons ce qui aurait été nécessaire depuis longtemps sur le plan écologique. Nombreux sont celles et ceux qui trouvent de bons côtés à cette sobriété (sufficience). Mais l’équilibre économique de certains individus est fortement menacé. Dans les pays les plus pauvres notamment, de nombreuses personnes seront accablées par la misère. Il est de notre responsabilité de saisir les opportunités écologiques, de se comporter de manière socialement responsable et de préserver notre monde pour l’avenir. Il serait insensé de garder des œillères et de reprendre le cours de notre vie comme avant la crise.
Nous pouvons agir si nous le voulons
En quelques semaines, le Conseil fédéral et le Parlement ont mis à disposition des dizaines de milliards de francs pour atténuer les conséquences de la crise du coronavirus. Nous avons tous fait l’expérience de mesures drastiques, alors que jusqu’à présent nous n’avions jamais consenti d’aussi grands efforts pour protéger efficacement la biodiversité et le climat. L’effondrement de la biodiversité nous menace-t-il moins que cette pandémie? Pouvons-nous continuer à ignorer le dérèglement climatique? Bien sûr que non! Pro Natura demande que nous nous dirigions vers un monde plus résistant aux crises, en nous affranchissant de l’obligation de croissance, de l’agriculture industrielle, des combustibles fossiles et de la surexploitation des ressources. Mettons-nous en chemin sans tarder, par des décisions politiques, sociales et individuelles.
Protéger la biodiversité sur la planète et en Suisse
La biodiversité est la base de notre existence. La nature nous fournit les matières premières de nos vêtements, de notre nourriture, de nos médicaments et de nos matériaux de construction. Elle est soumise à une pression quotidienne. La biodiversité, le bien-être animal et la santé humaine sont étroitement liés. Le SRAS, le MERS-CoV, le virus Ebola, le VIH, le nouveau coronavirus et d’autres agents pathogènes se sont propagés des animaux aux humains. La destruction des habitats naturels faisant barrière et la détention inappropriée d’animaux sauvages et d’élevage ont joué un rôle décisif dans ces épidémies.
Pour y remédier, les approches envisageables sont les suivantes:
- Un engagement international accru de la Suisse pour une meilleure protection des forêts tropicales, une protection efficace des espèces à l’échelle mondiale, des circuits économiques régionaux et un commerce mondial équitable.
- Un plan d’action pour la régénération, la revitalisation et un entretien durable de tous les biotopes d’importance nationale en Suisse.
- Une protection immédiate et une mise en réseau des zones les plus importantes pour la nature en Suisse (infrastructure écologique).
- Des programmes d’impulsion pour des besoins urgents, tels que la revitalisation des cours d’eau et la création de zones où la dynamique naturelle a la priorité.
Renforcer l’agriculture écologique et la sécurité d’approvisionnement
Seule une agriculture écologique, moins dépendante des importations, contribue durablement à l’approvisionnement de la population. Elle favorise également la biodiversité. La consommation de la population pendant la crise du coronavirus montre ce dont nous avons besoin: des produits biologiques, régionaux, de la ferme.
Les approches envisageables sont les suivantes:
- Réduction du nombre excessif de têtes de bétail et des importations d’aliments pour animaux (volaille, porcs).
- Promotion d’une production végétale diversifiée.
- Programmes d’impulsion pour l’agriculture biologique, pour les produits biologiques dans la restauration collective et pour les produits végétariens dans la gastronomie.
Une prise de conscience augmentant la protection du climat
Durant la canicule de l’été 2003, le dérèglement climatique a déjà provoqué un millier de décès prématurés en Suisse. Depuis, la crise climatique s’est aggravée de façon spectaculaire. Le printemps 2020 sera également marqué par la sécheresse et des températures record. La nature souffre. Nous devons nous affranchir du pétrole, du gaz et du charbon. .
Les approches envisageables sont les suivantes:
- Augmenter les taxes sur le CO2 de manière sensible et socialement responsable.
- Cesser immédiatement de subventionner le transport aérien.
- Introduire la vérité des coûts dans tous les moyens des transports.
Renforcer le lien avec la nature et promouvoir la suffisance
Aujourd’hui, c’est la crise du coronavirus qui nous contraint à faire des efforts brutaux. Demain, ce sera peut-être la crise de la biodiversité ou la crise climatique, avec des conséquences encore plus dramatiques. Ce n’est pourtant pas une fatalité. Nous pouvons opter volontairement pour plus de sobriété, de régionalité et pour un ralentissement de notre rythme de consommation. Pour vivre mieux tout en abîmant moins la nature, notre lien avec elle doit se renforcer.
Les approches envisageables sont les suivantes:
- Renforcer les expériences dans la nature à tous les niveaux scolaires et dans le cursus de formation professionnelle.
- Promouvoir un enseignement orienté vers l’action, en maintenant un équilibre entre les expériences dans la nature et le monde virtuel.
- Assurer des informations sur l’environnement et la nature plus facilement accessibles dans la vie quotidienne.
Comprendre et vivre la solidarité de manière globale
Pour lutter contre les impacts du coronavirus, nous avons aujourd’hui besoin de solidarité au-delà du cercle familial, des générations et des frontières nationales. Étendons ces principes à notre approche de la biodiversité et du climat, ici et ailleurs. Pour les générations futures, pour les populations du Sud qui sont particulièrement touchées par les crises mondiales et pour nous-mêmes.