Pro Natura Friedrich Wulf
10.03.2022 Crise de la biodiversité

La lutte pour la biodiversité se prépare à Genève

En 2010, la communauté internationale s’était fixé vingt objectifs pour stopper l’extinction planétaire des espèces dans les 10 ans. En 2020, aucun de ces objectifs n’était atteint. Les travaux pour une nouvelle stratégie pour les dix prochaines années débutent le 14 mars à Genève. Pro Natura y participe.

«Des décisions importantes vont être prises en Suisse ces deux prochaines semaines», souligne Friedrich Wulf. Le responsable Politique de la biodiversité chez Pro Natura sera à Genève avec des représentant·e·s des 195 États signataires de la Convention sur la diversité biologique (CDB), des organisations de protection de l’environnement et des entreprises. Leur tâche: définir les nouveaux objectifs contre la crise de la biodiversité, les mécanismes de mise en œuvre et les indicateurs de succès. Le nouveau cadre de référence mondial s’appliquera jusqu’en 2030. Il doit être adopté d’ici la fin de l’été lors de la 15e Conférence des parties à la Convention sur la diversité biologique (COP 15) dans la ville chinoise de Kunming. De nombreuses divergences subsistent encore entre les États parties. Voici les principaux points de friction qui seront discutés du 14 au 29 mars.

1. La mise en œuvre

Aucun des vingt objectifs de la COP10 de 2010 n’a été pleinement atteint. «Cela est dû entre autres à ce que la mise en œuvre a été confiée à des agences environnementales insuffisamment dotées, alors que les instances responsables de l’économie, des transports et de l’agriculture continuaient allègrement à nuire à la diversité des espèces», explique Friedrich Wulf. Nous devons par conséquent nous accorder sur des mécanismes de mise en œuvre contraignants qui engagent l’ensemble des appareils publics. Il manque au bas mot 700 milliards de francs pour atteindre les nouveaux objectifs. Comme le demande l’expert, «une bonne partie de cette somme pourrait être récupérée en abolissant ou en redirigeant des subventions qui portent atteinte à la biodiversité et en réduisant les facteurs qui accélèrent son effondrement».

2. La diversité des espèces

Une «Coalition de la haute ambition», dont fait partie la Suisse, veut obtenir qu’au moins 30 % des terres et des océans du monde soient protégés en 2030. «Actuellement, seuls 6 % du territoire suisse et environ 16 % des surfaces mondiales bénéficient d’une protection légale complète. Mais se contenter de délimiter des surfaces ne suffit pas: les régions doivent être représentatives, bien reliées entre elles et surtout efficacement gérées» insiste Friedrich Wulf. Il faut aussi que les droits des populations soient entièrement respectés lors de la création des aires protégées.

3. La surconsommation

La sauvegarde de la diversité des espèces n’est pas uniquement l’affaire des consommateurs et des entreprises, comme on peut le lire dans le projet. «Les États doivent être obligés d’instaurer des règles et des mesures incitatives qui orientent l’économie dans une voie durable et réduisent la surconsommation, délétère pour les écosystèmes.» 

4. Les ressources génétiques

Jusqu’ici, les peuples autochtones gardiens de la biodiversité ont été rémunérés en échange de plantes et d’animaux dotés de propriétés thérapeutiques. Désormais, grâce aux méthodes du génie génétique, l’accès physique à ce matériau n’est plus nécessaire. «Nous demandons que la transmission d’informations génétiques sous forme numérique soit aussi soumise à l’obligation de partager les profits qui en découlent, et que la Suisse prenne cet engagement en tant que site pharmaceutique majeur», martèle Friedrich Wulf. 

5. La conservation doit être prioritaire

Le nouveau cadre de référence veut rétablir 20 % des écosystèmes aujourd’hui dégradés. Mais la priorité absolue doit aller à la conservation des marais et des forêts pluricentenaires. «Il faut s’attaquer aux vrais problèmes que sont la consommation de combustibles fossiles ou la disparition de précieuses surfaces naturelles. Planter de nouvelles forêts n’est pas la solution, car ce qui est perdu est perdu», rappelle Friedrich Wulf.  

 

Contact

Friedrich Wulf, chef de projet Politique de la biodiversité, tél. 079 216 02 06; 061 317 92 42, @email
 

La crise de la biodiversité en quelques mots
Par l’évolution de nos modes de vie, nous avons gravement endommagé trois quarts des surfaces terrestres et deux tiers des océans, détruit d’innombrables habitats et anéanti des myriades d’espèces. Si rien ne change, près d’un million d’espèces animales et végétales auront disparu de la surface de la Terre d’ici quelques décennies. Avec des conséquences désastreuses pour les écosystèmes dont dépend la survie de l’humanité. Les marais et les forêts stockent du CO2, les insectes pollinisent les plantes qui fabriquent notre nourriture, les vers maintiennent la fertilité des sols. Pour préserver ces cycles vitaux, nous devons sans tarder changer de cap : www.initiative-biodiversite.ch. 

 

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