«Le compte de nos espaces sauvages est un constat d’échec»
«La Suisse doit mieux protéger les grands sites naturels proches de leur état originel qui subsistent sur son territoire». Jan Gürke résume ainsi le constat impératif formulé par septante d’expert·es réuni·es aujourd’hui à Bienne pour discuter de l’avenir des espaces sauvages du pays. Le responsable de la campagne de Pro Natura sur les espaces sauvages tire la sonnette d’alarme, alors que divers projets d’aménagement dédiés au tourisme et à la production d’énergie mettent en danger nos derniers paysages intacts. «Que le Parc National soit la seule et unique grande réserve de nature sauvage des Alpes suisses est un aveu d’échec. Pour prévenir l’effondrement de la biodiversité, il faut absolument que d’autres régions bénéficient d’une protection étendue et pérenne». Un avis que les spécialistes participant au congrès ne sont pas seul·es à défendre, puisque plus d’un millier de leurs collègues l’ont exprimé l’an dernier lors d’une enquête portant sur les espaces sauvages.
Un réseau d’espaces naturels proches de l’état originel
À côté des grandes aires protégées, il est important de maintenir aussi des «petits coins de nature sauvage» laissés libres au cœur des zones habitées, souligne André Stapfer, membre du Groupe spécialisé Infrastructure écologique. «Ils constituent des biotopes-relais permettant le déploiement d’un réseau d’espaces sauvages sur l’ensemble du pays». À l’heure où les forêts sont souvent réduites à leur fonction productrice et protectrice, nous devons aussi reconnaître leur valeur écologique en tant qu’habitat pour les espèces menacées, plaide Thibault Lachat, professeur à la Haute École des sciences agronomiques, forestières et alimentaires. «Notre Animal de l’année, le lérot, ne peut survivre sans les forêts et les espaces sauvages», rappelle Sara Wehrli de Pro Natura, qui présente une nouvelle carte de répartition de l’espèce, établie grâce au projet de science citoyenne en cours.
«Petits ou grands, les espaces sauvages contribuent à notre santé», ajoute Nicole Bauer, de l’Institut fédéral de recherche sur la forêt, la neige et le paysage. Sophie Chanel, directrice du Parc Naturel du Jorat, montre que son parc récemment récompensé concilie protection de la nature sauvage et nécessité de disposer d’une zone de détente aux portes de Lausanne. Dans les Alpes suisses également, les besoins de la population jouent un rôle déterminant pour la protection des espaces sauvages, comme le relate Sebastian Moos de Mountain Wilderness Suisse. À l’exemple du projet «Wildnis-Dialog Kandersteg», il expose comment sensibiliser à la valeur des espaces sauvages dans les régions de montagne et encourager à en prendre soin. Au terme d’un congrès de haute tenue, Pro Natura espère enfin une prise de conscience de cette valeur en politique et en pratique.
Contact:
- Jan Gürke, responsable de la campagne «Espaces sauvages – plus de place pour la nature!», 079 720 99 08, @email
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Photo © Benoît Renevey