Paysage automnal autour des lacs du Val Viola Raphael Weber
07.03.2025 Crise de la biodiversité

«Un changement de cap est indispensable»

Voilà un peu plus de deux ans qu’Albert Rösti a accédé au Conseil fédéral. L’heure est au bilan, qui est loin d’être positif, notamment en ce qui concerne la gestion du loup et la crise de la biodiversité.

Le Magazine Pro Natura: Quel bilan tirez-vous des deux premières années d’Albert Rösti au Conseil fédéral?

Urs Leugger-Eggimann: On a nettement senti sa signature dans les dossiers environnementaux. Certes, il y a des domaines pour lesquels il a travaillé dans la lignée de Simonetta Sommaruga – qui l’a précédé –, notamment en ce qui concerne la promotion des énergies renouvelables, et dans une certaine mesure, nous soutenons sa position. Mais lorsqu’il s’agit de projets qu’il a lui-même initiés à son accession au Conseil fédéral, c’est nettement plus problématique. 

À quoi pensez-vous?

À son ouverture à l’énergie nucléaire par exemple, qui s’avère complètement contreproductive: cela entraîne une insécurité dans la promotion des énergies renouvelables. Et bien sûr, je pense aussi au peu d’importance qu’il accorde à la conservation et à la promotion de la nature et de la biodiversité. 

C’est principalement là où le bât blesse?

Oui, car il ne reconnaît pas que le changement climatique et la disparition des espèces sont liés et qu’ils ne peuvent être résolus qu’ensemble. Dès lors, les énergies renouvelables sont trop souvent encouragées au détriment de la biodiversité, qui est considérée comme quantité négligeable. De plus, dans le cadre de la campagne pour l’Initiative biodiversité, il a toujours souligné que les bases légales existantes et les moyens financiers mis à disposition suffisaient pour préserver notre source de vie, mais c’est faux, comme l’ont attesté de nombreux scientifiques et experts de l’administration fédérale. Quant au plan d’action évoqué maintes fois pendant la campagne et qui a été adopté en novembre 2024 par le Conseil fédéral, on peut plutôt le qualifier de plan d’inaction. 

On a aussi beaucoup reproché à Albert Rösti sa gestion du loup…

Il a réagi trop fort et trop rapidement. La nouvelle ordonnance entrée en vigueur en février 2025 apporte quelques améliorations, mais elles sont minimes. M. Rösti considère le loup uniquement comme une menace et n’envisage que les problèmes qu’il peut apporter. Il devrait plus s’intéresser à son utilité et à sa place dans l’écosystème, tout en étant conscient que le retour du loup s’accompagne de grands défis.

Envisagez-vous avec appréhension ses prochaines années au gouvernement?

S’il continue sur la même lignée que durant les deux premières années de son mandat, ce sera problématique. Un changement de cap est indispensable, une orientation claire de sa part en faveur de la nature, de la biodiversité et de l’environnement. Nous espérons réussir à lui montrer cette nécessité. Nos enfants et petits-enfants ont besoin d’une nature et d’un environnement intacts et diversifiés pour vivre. Et même les entreprises les plus importantes citent le changement climatique, la destruction de l’environnement et la perte de biodiversité parmi les dix plus grands risques pour une économie et une société prospères. Nous espérons que de telles connaissances guideront à l’avenir l’action de notre ministre de l’Environnement.

TANIA ARAMAN, rédactrice du Magazine Pro Natura

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Cet article a été publié dans le Magazine Pro Natura.

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