Crise de la biodiversité: les défis de la protection de la nature en Suisse
«On s’imagine souvent que protéger la nature consiste simplement à la “laisser tranquille”», observe Bastien Amez-Droz, chef de projet tourbière à Pro Natura. «Mais l’impact des activités humaines passées agit aujourd’hui encore négativement et se cumule aux perturbations actuelles. Sans notre aide, de nombreux milieux naturels et espèces rares auraient déjà disparu. C’est particulièrement visible dans le cas des tourbières».
Les efforts actuels ne sont pas suffisants
Dans la Vallée des Ponts-de-Martel par exemple, la protection et la revitalisation des tourbières a demandé plus de 4000 heures de travail au cours des 10 dernières années. «Avec le service cantonal de la nature, nous avons comblé les fossés de drainage, aménagé des plans d’eau , supprimés des drains en bordure de marais ou encore éclairci les surfaces marécageuses», détaille Yvan Matthey, responsable des programmes de revitalisation des tourbières de la section neuchâteloise de Pro Natura et responsable des travaux. Ces mesures sont efficaces à l’échelle locale et régionale, mais elles ne suffisent pas à empêcher la chute de la biodiversité partout dans notre pays. En Suisse, un tiers de toutes les espèces et la moitié des milieux naturels sont menacés de disparition. Et avec eux, des cycles indispensables comme la purification de l’eau, la pollinisation, la régénération des sols ou encore la captation de CO2.
De nombreux défis
Les tourbières des Ponts-de-Martel offrent un exemple des énormes défis que doit relever la protection de la nature en Suisse. «Historiquement, la végétation de marais occupait près de 1500 hectares dans la vallée . Il n’en reste aujourd’hui que 227 hectares, dont la grande majorité a été fortement marquée par l’exploitation de la tourbe et souffre de l’assèchement de leur sol. Les travaux de revitalisation demandent beaucoup de ressources et de temps. » Pour Bastien Amez-Droz, cette situation est représentative de nombreuses réserves naturelles en Suisse.
Faire davantage de place à la nature – également dans nos têtes
«Il ne subsiste aujourd’hui que 10% des zones marécageuses qui existaient au 19e siècle, et seulement 1% qui n’a pas subi de grandes perturbations. Pour renverser la tendance, notre société devrait redonner davantage de place à la nature, et pas seulement en ce qui concerne les marais ou les réserves naturelles, mais aussi au cœur des espaces urbains , des terres cultivées, et surtout dans nos têtes», souligne Bastien Amez-Droz. «Si nous voulons conserver la biodiversité pour les générations futures, nous devons parvenir à concilier protection et exploitation». C’est précisément l’objectif de l’Initiative biodiversité sur laquelle les Suissesses et les Suisses seront amené·e·s à se prononcer le 22 septembre.